US EUROPE AFRICA ASIA

G20 : un sommet face à de grandes attentes

Par Andrew Moody(China Daily) 02-09-2016

G20 : un sommet face à de grandes attentes

Des volontaires appartenant à l'organisation Xiaoqinghe, littéralement « Petit lotus vert », réunis pour une photo de groupe avant l'ouverture du sommet du G20 à Hangzhou. [Wang Zhuangfei/China Daily]

Les dirigeants des principaux pays en quête de solutions sur fond de croissance mondiale anémique.

Il est nécessaire que le sommet du G20 fasse naître l'espoir qu'il existe des solutions à la croissance molle dans laquelle l'économie mondiale est actuellement engluée, dit un universitaire chinois de premier plan. Les dirigeants des principaux pays de la planète vont se réunir à Hangzhou, dans l'Est de la Chine, dans un contexte économique difficile qui voit les mesures de relance s'avérer de plus en plus inefficaces.

Autres sujets de préoccupation grandissante : une Europe déstabilisée à la suite du vote britannique en faveur d'une sortie de l'Union (« Brexit) et l'imminence d'un relèvement des taux d'intérêt aux États-Unis.

Pour Shi Yinhong, professeur de relations internationales et directeur du Centre d'études américaines à l'Université Renmin de Chine, il importe que le sommet fasse savoir qu'une croissance anémique n'est pas une caractéristique permanente de l'économie mondiale. « Je pense qu'il doit impérativement s'agir là d'un objectif essentiel, afin de créer un sentiment d'espoir que le monde peut prendre une orientation positive », estime-t-il.

Le grand changement intervenu depuis le dernier sommet en novembre dernier à Antalya, en Turquie, réside dans un sentiment de frustration croissant face à l'inefficacité des politiques économiques menées depuis la crise financière mondiale de 2008.

Il n'est pas exclu, selon certains, que les grands de ce monde s'éloignent des politiques d'austérité visant à la réduction de l'endettement en faveur d'un effort budgétaire plus soutenu. Au lendemain du vote sur le Brexit, le gouvernement britannique a d'ailleurs abandonné son objectif de dégager un excédent budgétaire à l'horizon 2020 et prévoit maintenant d'investir dans les infrastructures et d'autres projets.

Zhu Ning, doyen adjoint de l'Institut supérieur des finances à l'Université de Shanghai, ne doute pas que la politique budgétaire fera partie des questions prioritaires à l'ordre du jour. « Je pense que le défi sera de définir un cadre permettant aux différents pays d'élaborer ensemble des mesures de relance budgétaire susceptibles d'accélérer la croissance », indique-t-il.

Une telle chose est plus facile à dire qu'à faire, selon Rana Mitter, directeur de l'Université Dickson Poon au Centre d'études chinoises d'Oxford : « Les pays ont atteint la limite de leurs cartes de crédit et je ne suis pas sûr qu'il y ait une grande appétence pour une augmentation des impôts ».

« L'expansion budgétaire se heurte à deux grands types d'obstacles », fait-il valoir. « Il s'agit en premier lieu des obstacles politiques tels que le fardeau de l'euro comme monnaie unique en Europe et le récent vote en faveur du Brexit au Royaume-Uni. Et puis il y a les changements structurels à long terme dans lesquels sont pris les différents acteurs économiques et qui laissent peu de marge de manœuvre aux gouvernements ».

Martin Jacques, auteur du livre When China Rules the World (Quand la Chine dominera le monde) et professeur invité à l'Institut des relations internationales modernes de l'Université Tsinghua à Pékin, croit que le sommet pourrait donner lieu à un tournant. Il affirme que le néolibéralisme occidental qui domine le programme d'action depuis les années 1980 est en phase de déclin terminal et rejeté par les électeurs, comme le montre le soutien tant à Bernie Sanders qu'à Donald Trump aux États-Unis.

« La gouvernance mondiale est en crise. Je pense que de nombreux pays, en particulier dans le monde en développement, se tournent maintenant vers la Chine pour montrer la voie. Si l'on considère ce qui constitue le moteur de la croissance en Asie centrale, c'est l'Initiative de la Ceinture économique et de la Route de la soie maritime. De la même façon, en Afrique, ce sont les investissements chinois dans les infrastructures », résume-t-il. Et d'ajouter qu'« avec de nouvelles institutions comme la Banque asiatique d'investissement pour les infrastructures, la Chine se voit comme catalyseur de la mondialisation ; en revenant ne serait-ce que trois ou quatre ans en arrière, on n'aurait en aucune façon dit qu'il en serait ainsi ».

Pour Kerry Brown, professeur d'études chinoises et directeur de l'Institut Lau China au King's College de Londres, les problèmes auxquels le monde est désormais confronté sont trop complexes pour être résolus en une réunion quelle qu'elle soit. « Cela donne certes l'occasion de parvenir à une sorte de consensus international sur ce qu'il convient de faire. La vraie question sera de savoir comment, d'une part, répondre aux attentes des peuples concernant leur niveau de vie, dans un cadre de développement durable, et d'autre part, de traiter les inquiétudes réelles concernant la stagnation des revenus », explique-t-il.

L'un des points principaux à l'ordre du jour concernera la façon de réagir aux mesures protectionnistes prises individuellement par les pays. Trump, le candidat républicain à l'élection présidentielle américaine, s'est prononcé pour des tarifs douaniers pouvant aller jusqu'à 45% sur les produits chinois.

David Shinn, attaché temporaire d'enseignement et de recherche en affaires internationales à l'Université George Washington, croit que le sommet se déterminera fermement en faveur du libre-échange. « Le protectionnisme commercial correspond à une tendance croissante dans un certain nombre de pays occidentaux. Nous le voyons certainement dans la campagne présidentielle américaine où il repose sur l'argument selon lequel la mondialisation se traduit par une perte d'emplois américains », dit-il avant de préciser que « la plupart des Américains comprennent que le protectionnisme et les guerres commerciales qui s'ensuivent font plus de mal que de bien ».

À Oxford, M. Mitter considère que c'est un énorme défi que devront relever les dirigeants nationaux et les responsables de l'élaboration des politiques pour produire un sommet qui change les règles du jeu. « Les gens parlent toujours de repenser le programme, mais est-il une personne qui sache vraiment à quoi ressemblerait un nouveau programme ? »

M. Zhu, également professeur de finance à l'Université Tsinghua, estime que tous les outils traditionnels existants dans les domaines monétaire et budgétaire ont déjà été utilisés. « L'impact marginal de telles mesures diminue de plus en plus, ce qui veut dire qu'il est bien difficile de déterminer la solution » au problème posé, avoue-t-il.

M. Shi de l'Université Renmin est pour sa part convaincu qu'il existe d'autres voies pouvant être suivies. « Il faut mettre l'accent sur l'importance de l'innovation comme moteur de la croissance et c'est là que la Chine peut donner l'exemple avec le développement rapide des technologies vertes et du commerce électronique » qu'elle favorise. Et de souligner que « c'est là que la Chine peut indiquer aux autres une voie à suivre ».

PDF

 
Ce site est produit par le China Daily de la République populaire de Chine.