Dans les hotpots de Chongqing et de Chengdu, des « pelletées » de piments de chili et des grains de poivre à mettre la bouche en feu sont frits avec d’autres épices dans une grande quantité de graisse de bœuf fondue. [Provided to China Daily] |
La vapeur monte, réchauffant les visages et les mains. Sur la table sont empilés des tranches de viande crue et des plateaux de légumes. Chaque convive tient précieusement le bol de sauce placé devant elle ou lui pour bientôt y tremper les ingrédients que l’on vient de faire cuire.
Dans toute la Chine, le « hotpot » – nom de la fondue chinoise – constitue le repas le plus demandé en hiver. Et si la gamme des ingrédients peut varier de l’est à l’ouest ou du nord au sud du pays, la formule reste généralement la même. Les morceaux de viande de la taille d’une bouchée et les légumes sont cuits à la table dans un pot où mijote un bouillon.
La plupart des historiens de l’art culinaire s’accordent sur le fait que le hotpot est apparu avec les Mongols pendant la dynastie Yuan (1271-1368). Il semble que les soldats de l’époque, qui voyageaient léger, se servaient de leurs casques pour y faire bouillir de l’eau et y faire cuire des morceaux de viande.
Mais ce sont les chefs de cuisine musulmans installés dans la Cité interdite qui ont raffiné la recette pour en faire un art, en l’enrichissant de morceaux d’agneau et de bœuf relevés d’épices de la Route de la soie telles que le chili, le fenouil et le cumin, le tout fermenté avec des fleurs de ciboulette sauvages provenant des prairies nordiques. C’est aussi à eux que l’on doit les grands pots en cuivre avec entonnoir qui sont devenus une icône de Pékin.
Ces premiers chefs ont formulé la matrice des hotpots dont on raffole au nord du fleuve Yangtsé, où l’on préfère l’agneau faisandé, les sauces fortes et le chou d’hiver.
Jadis, on ne disposait pas de fruits de mer, ou alors en très faibles quantités, et les poissons utilisés étaient des variétés d’eau douce, telles que la carpe.
Pour des hotpots aux fruits de mer, il nous faut aller beaucoup plus au sud dans les localités côtières du Fujian, de la région de Chaoshan et d’autres endroits de la province du Guangdong.
Là, le poisson frais, les coquillages et les produits conditionnés tels que les boulettes de poisson figurent en bonne place dans un repas de hotpot. On y trouve aussi en bien plus grandes quantités de la verdure, notamment des pieds de moutarde, des cœurs de chou et des chrysanthèmes de jardin parmi les légumes nécessaires à tout hotpot qui se respecte.
Les autres différences résident dans le bouillon. Vous pouvez deviner presque instantanément la région dont le chef est originaire à la vue du jus qui arrive sur la table.
À Pékin, le bouillon est clair et n’a pratiquement pas de goût. Vous êtes censé lui donner de la saveur au fur et à mesure que la viande cuit. Personne n’en prend une gorgée avant d’être à la moitié du repas.
Il existe une autre version nordique dans laquelle la souris d’agneau est cuite dans un épais bouillon épicé. Elle est connue sous le nom de yangxiezi qui veut dire « os de scorpion ». On y trempe du tofu, des boulettes de viande et d’autres produits pour les faire cuire dans le liquide bouillonnant. Ce hotpot consistant est particulièrement demandé dans les restaurants hutong, où les habitués préfèrent les plats très assaisonnés.
Dans les hotpots de Chongqing et de Chengdu, des « pelletées » de piments de chili et de grains de poivre à mettre la bouche en feu sont frites dans une grande quantité de graisse de bœuf fondue puis versées sur un bouillon léger. Ceci forme une couche d’huile et de chili de trois millimètres au-dessus du bouillon dans un chaudron frémissant de lave épicée. Une trempette rapide dans cette concoction a vite fait de cuire la viande ou les abats de quelque nature qu’ils soient dont raffolent les gourmets du Sichuan.
Mais quand il s’agit de hotpots précurseurs d’une nouvelle tendance, il faut rendre justice aux fines gueules de Hong Kong.
Tout a commencé avec les modestes stands de « steamboat » (ou « bateaux à vapeur », autre nom désignant les hotpots) qui surgissaient l’hiver dans les ruelles. Ils comprenaient chacun une table basse en bois munie d’un réchaud au charbon de bois sur lequel mijotait un pot de bouillon, et un plateau métallique chargé de tranches de viande, d’huîtres, de palourdes, d’ailes de poulet, de légumes, de champignons, de tofu frais et de tofu séché.
À partir de ces daipaidong (stands découverts), le hotpot de Hong Kong a émigré vers le haut de gamme dans les restaurants proposant du bœuf très marbré de premier plan, le feiniu huoguo.
Plusieurs réincarnations et plusieurs décennies plus tard, la vogue actuelle, c’est le hotpot de potage tonique plein de collagène naturel. Le bouillon est généralement à base de jarrets de porc et d’un mélange secret d’herbes fines séchées.
Les pots en cuivre avec entonnoir sont devenus une icône de Pékin. [Provided to China Daily] |